Testo Jeannete

Testo Jeannete

Ne me dites pas que Jeanne était belle. Ne me dites pas, ne me dites pas que tous les garçons se seraient pour elle fait couper les bras. Elle avait les mains fortes qui consolent, le regard pesant des femmes comblées et cette splendeur de la faux qui vole sur les champs de blé. Par Dieu, je le sais bien qu'elle était belle Jeannette, qu'elle avait le c?ur grand comme un buisson de fleurs, une auberge de c?ur où tous les gueux s'arrêtent venant y déposer leur bagage et leur peur. Jeanne avait les bras courbés pour la gerbe et l'homme était gerbe en ses bras la nuit. Elle moissonnait ses peines acerbes, fauchait ses ennuis. Elle avait le flanc creusé en corbeille pour y recueillir les fruits de l'été. Ses lèvres savaient comme des abeilles aux fleurs s'arrêter. Par Dieu, je le sais bien qu'elle était belle, Jeannette, qu'elle avait le c?ur grand comme un buisson de fleurs, une auberge de c?ur où tous les gueux s'arrêtent, venant y déposer leur bagage et leur peur. Quand elle passait, je la voulais morte, moi, triste pucelle au c?ur indistinct. Quand on l'a trouvée, c'était à ma porte, un dimanche matin. Quand je vois dormir près de moi mon homme, le seul que Jeannette en sa vie aima, je ne parviens pas à trouver mon somme, moi qui ne l'aime pas. Par Dieu, je le sais bien qu'elle était belle, Jeannette, qu'elle avait le c?ur grand comme un buisson de fleurs, une tombe fleurie où ma pensée s'arrête pour y calmer un peu mon sommeil et ma peur.
Testi Anne Sylvestre